Panorama économique
Sans pour autant générer de modifications majeures au niveau des perspectives économiques mondiales, deux pays se sont particulièrement distingués ces dernières semaines.
Le réveil de l’économie chinoise ?
Une fois n’est pas coutume, la Chine est revenue sur le devant de la scène. Alors que les données économiques de ces derniers trimestres montraient une activité qui ne cessait de se dégrader, les autorités politiques chinoises ont enfin pris conscience de la situation. Elles ont récemment annoncé une série de mesures qui vise à soutenir l’économie du pays. Deux objectifs principaux sont visés par le gouvernement chinois. Il s’agit avent tout de relancer la consommation domestique et de stabiliser le marché de l’immobilier. Les prix de ce dernier est devenu un élément incontournable de la confiance des ménages locaux comme le montre le graphique ci-dessous.
En effet, comme 70% de la richesse patrimoniale des ménages correspond à la valorisation de leurs biens immobiliers, les responsables politiques se doivent de relancer le secteur immobilier, afin de faire rebondir les ventes de détail. Pour cela, les chinois pourront acheter un bien immobilier avec moins d’apport personnel, les taux hypothécaires vont baisser, et la banque publique pourra financer à 100% des opérations de déstostockage immobilier. D’un point de vue monétaire, les taux directeurs ont été réduits, comme celui des réserves obligatoires des banques. Les particuliers les plus pauvres devraient également bénéficier d’une allocation mensuelle de la part de l’état. Enfin, certaines mesures sont également prises pour relancer la dynamique des marchés financiers.
À ce jour, il convient de s’interroger si de telles annonces vont s’avérer suffisantes pour modifier la trajectoire à long terme de l’économie chinoise ? Il est probablement prématuré de répondre avec certitude à cette question. Cependant, si l’état a confirmé vouloir toujours privilégier sur la durée la sécurité nationale et la croissance à haute valeur ajoutée, les autorités politiques ont la volonté de maintenir la croissance du PIB chinois proche de +5% lors des prochains trimestres. Si cette salve de premières annonces ne débouchait pas sur les résultats souhaités, il est fort probable que d’autres mesures de soutien à l’activité seront de nouveau annoncées. À suivre donc dans les prochains mois...
Les Etats-Unis sont l’autre pays qui a également attiré l’intention des investisseurs en septembre. Il faut se rappeler des statistiques décevantes en juillet sur le plan économique qui avaient fait « plié » les marchés financiers début août. En effet, de nombreux indicateurs laissaient supposer une récession d’ici la fin d’année. Or, une fois de plus, cette hypothèse ne semble plus crédible, grâce notamment aux données sur l’emploi. Les créations de nouveaux postes sur septembre ont fait preuve d’une étonnante fermeté. Celles-ci sont en progression de 254 000, soit le chiffre le plus élevé depuis 4 mois, comme l’affiche le graphique ci-dessous.
La résilience des chiffres sur l’emploi, à l’image également de la baisse de 0,1 point du taux de chômage à 4,1%, démontre une fois de plus, que l’économie américaine n’est pas aux « portes » d’un ralentissement significatif de l’activité. Les conjoncturistes en profitent par ailleurs pour réviser à la hausse leurs projections de progression du PIB au troisième 2024, qui pourrait même atteindre +3%, contre +1,6% envisagé initialement. Dans ces conditions, avec une inflation qui se normalise progressivement (en dehors d’une légère déception sur le mois de septembre et des tensions à court terme sur les cours du pétrole), la Fed n’a pas de raison légitime d’accélérer la baisse de ses taux directeurs. Les spécialistes prévoient maintenant deux ajustements de -25 points de base d’ici la fin d’année.
L’économie européenne à la peine
Sur le vieux continent, « la fête est finie » avec la fin des JO de Paris. La France avait largement profité de cet événement pendant l’été, et le retour à la réalité du quotidien est douloureux ! C’est ainsi que l’indice PMI des services, représentatif de la confiance des chefs d’entreprises dans ce secteur, chute lourdement en septembre en repassant sous la barre des 50 points à 49,6. L’indicateur avancé composite PMI de la zone euro subit également la même tendance, et repasse en zone de contraction, tiré une nouvelle fois vers le bas par le secteur manufacturier. Ce dernier est représentatif de la dynamique de l’économie allemande qui continue à souffrir, notamment au sein des industries de chimie et de construction d’automobiles. Mais, tous les acteurs économiques outre-Rhin sont dans une dynamique peu favorables, y compris les ménages allemands. Ces derniers restent particulièrement méfiants, et contrairement aux ménages espagnols, continuent à « rogner » sur leurs dépenses de consommation (cf. graphique ci-dessous).
L’exécutif allemand a pris acte du contexte local, et officialise un nouveau recul de son PIB en 2024, après un exercice déjà « dans le rouge » en 2023.
Mais les économistes restent optimistes sur les perspectives européennes en 2025. L’effet de levier le plus favorable est dans les mains des banquiers centraux qui devraient continuer à soulager la pression monétaire et rendre plus abordables l’ensemble des crédits, aussi bien pour les entreprises que pour les particuliers. Ces derniers disposent d’une épargne considérable qui pourra être utilisé, si la confiance des ménages continue à remonter. Pour cela, il faudra néanmoins éviter une remontée rapide des prix de l’énergie (contexte géopolitique à surveiller), et une pression trop forte sur le plan fiscal, comme cela pourrait être le cas en France.
Marchés Financiers
Le mois d’octobre affiche une triste réputation s’agissant des marchés financiers en raison de nombreuses « surprises » qui jalonnent les éditions des années précédentes. Il semble que cette étape de l’année 2024 soit également de nature à inquiéter les investisseurs compte tenu des tensions toujours plus vives au Proche-Orient. Pour autant, il apparait que la toile de fond qui se met en place à l’horizon 2025 offre des perspectives favorables, à condition bien entendu que le mois d’octobre ne confirme pas l’envol d’un « cygne noir ».
Des éléments plutôt rassurants pour 2025
Les événements macroéconomiques ont été particulièrement importants au cours du mois écoulé. En premier lieu, l’histoire retiendra probablement la date du 18 septembre dernier (la FED baisse des taux de 0,50%) comme un point de retournement important pour l’ensemble des banques centrales mondiales, leur permettant d’adopter une attitude plus proactive en matière de politique monétaire.
Ainsi, ce calendrier aura notamment permis à la Chine de sortir de son attentisme passif et de frapper un grand coup en matière de relance de son économie : activation des leviers de politique monétaire et fiscale, recapitalisation des banques et soutien au marché immobilier. La nouveauté par rapport aux précédentes annonces de relances activées jusqu’à présent réside dans l’aspect coordonné et l’ampleur des montants mobilisés. Certes, l’objectif prioritaire est bien d’atteindre une croissance de 5% en 2024, mais il semble bien qu’on assiste à un revirement de doctrine des autorités qui désormais entendent vraiment relancer la consommation et restaurer la confiance des ménages en invoquant la volonté de faire ce qu’il faudra pour y parvenir.
Si ces annonces constituent assurément une bonne nouvelle pour la Chine, elles permettent également d’anticiper un redressement de l’activité manufacturière à l’échelle mondiale à l’horizon 2025. La relance chinoise reposait jusqu’à présent quasi uniquement sur les exportations. En exerçant une pression sur ses prix de vente, la Chine participait ainsi à la dépression industrielle mondiale qui pèse notamment sur l’économie allemande.
Au global, il s’agit d’une bonne nouvelle pour l’économie mondiale : quand les deux premières économies mondiales, USA et Chine, mobilisent au même moment des politiques monétaires et fiscales accommodantes, il faut y prêter attention. Cette synchronisation participe à une amélioration du cycle économique à l’horizon 2025.
Les éléments récents valident ainsi toujours un environnement plutôt porteur pour les actifs risqués. Du côté américain, les bons chiffres de l’emploi en septembre auront permis d’éloigner quelque peu les craintes de récession et d’absorber la volatilité des deux mois précédents. Le scénario de « soft landing » est crédibilisé. D’un autre côté, l’assouplissement des politiques monétaires va se poursuivre, peut-être à un rythme inférieur à celui anticipé à ce jour par les marchés financiers, mais constituant néanmoins un support pour la valorisation des actifs.
La trame est par conséquent rassurante même si à court terme, nous ne pouvons passer sous silence les sources d’incertitudes qui pèsent sur la confiance des investisseurs :
- Les élections US : l’aspect extrêmement serré du scrutin ne permet pas de prendre position en amont. Si les programmes des deux candidats offrent des différences notoires, il faudra également prendre en compte la future composition du Congrès pour voir dans quelle mesure ils pourront être implémentés.
La situation au Moyen-Orient : les risques sont importants et rajoutent une couche de complexité. Du point de vue économique, la première courroie de transmission des chocs géopolitiques est l’impact sur les matières premières, et surtout le pétrole. Le scénario du pire pour les investisseurs serait une forte hausse du prix de baril qui mettrait en péril le processus de désinflation toujours fragile. Les nouvelles récentes laissent penser que les actifs pétroliers pourraient être épargnés lors d’éventuelles représailles de la part d’Israël.
– La situation spécifique de la France : déjà éprouvés par la chute des valeurs de luxe et par des mois d’agitation politique, les investisseurs en France ont désormais une nouvelle inquiétude : le budget 2025. Après un déficit de 6,1% attendu en 2024, l’objectif est de 5,0% en 2025. Si cette évolution peut permettre de stabiliser la défiance sur la dette française, en revanche elle pourrait peser sur les actions via l’augmentation du taux d’impôt sur les sociétés. Il est probable qu’une partie de ces éléments ait déjà été intégrée dans les prix après la baisse récente des actions françaises. Affichant une stagnation depuis le début de l’année, le CAC 40 est très en retard par rapport à l’ensemble de l’Europe. Mais l’incertitude politique et fiscale persistante pourrait continuer à peser sur le sentiment des investisseurs à l’égard de la France.
Relèvement de notre recommandation sur les actions
« Rien n’étant moins sûr que l’incertain » (comme le disait très subtilement Pierre Dac), les marchés financiers ont pris l’habitude de composer avec les risques. Aussi, à ce stade de l’année, il nous semble opportun de nous projeter à un horizon 2025. Outre une saisonnalité favorable illustrée par la tendance des actions à bien se comporter au cours des derniers mois de l’année, nous prenons en compte également le regain d’optimisme aux États-Unis et en Chine qui apaise les inquiétudes concernant l’affaiblissement de la croissance mondiale. De plus, historiquement, les cycles d’assouplissement monétaire, significatifs d’une liquidité accrue, ont souvent profité aux classes d’actifs risqués. Les marchés actions se situent sur des niveaux relativement élevés, notamment le marché américain, mais leurs valorisations ne les situent pas au niveau d’une bulle. La thématique de l’intelligence artificielle, certes partiellement remise en question dernièrement, pourrait être relancée prochainement (il s’agit assurément d’une évolution technologique majeure) et bénéficier à l’ensemble du marché.
Nous relevons par conséquent notre pondération actions au terme d’une prudente période de neutralité. Ce renforcement s’effectue dans le cadre d’une vision large et concerne les différentes zones géographiques. Nous restons toutefois un peu plus prudents sur la Chine en considérant le scepticisme croissant quant à la durabilité du rallye. Nous notons bien d’une part un engagement plus fort à soutenir la croissance, et d’autre part que l’ampleur et l’exhaustivité des mesures de relance sont beaucoup plus importantes que les politiques du passé. Mais certaines confirmations sont encore nécessaires.
Par ailleurs nous poursuivons nos arbitrages au sein des segments obligataires sur les profils les plus défensifs. Tout en conservant une préférence pour les supports Investment Grade (les meilleures signatures), nous allégeons les expositions sur les obligations gouvernementales, uniquement sur les échéances à 3/5 ans en raison d’un rendement jugé désormais trop faible. Compte tenu de la possibilité d’une victoire de D.Trump synonyme de probables tensions sur les taux d’intérêt, nous reportons ces positions sur des supports ayant la faculté d’adopter une gestion flexible plus à même de tirer profit de ces tensions passagères.