Risques de surenchères sur les droits de douane
La tendance baissière se poursuit en ce début de semaine pour les marchés financiers. Les premières ripostes de la Chine aux tarifs douaniers américains et l’attitude inflexible de D. Trump face à la chute des marchés financiers font craindre une escalade de la guerre tarifaire accroissant de facto la probabilité de récession de l’économie mondiale. A l’heure actuelle cela n’est pas notre scenario central. La visibilité reste néanmoins très réduite sur les marchés qui évoluent davantage au gré des annonces politiques plutôt que sur la base de fondamentaux ou niveaux de valorisation. Il faut donc rester prudent. Nous réitérons notre recommandation neutre initiée en mars en attendant une stabilisation sur les marchés.
- En annonçant dès vendredi dernier des droits de douane de 34% sur l’ensemble des importations américaines applicables dès le 10 avril, en riposte aux annonces de hausses tarifaires du « jour de la libération », la Chine a diffusé un message négatif laissant ouverte la possibilité d’une guerre commerciale généralisée. En parallèle, l’Europe présentera une liste de produits américains ciblés par des droits de douane supplémentaires, en réponse aux taxes de 25% appliquées par les américains sur l’acier et l’aluminium.
- Bien qu’une cinquantaine de pays semblent plutôt opter pour des négociations avec les Etats-Unis, les nouveaux tarifs douaniers qui doivent normalement entrer en vigueur cette semaine représentent l’une des plus fortes hausses de taxes jamais appliquées par les Etats-Unis. A l’heure actuelle on estime que ce resserrement fiscal équivaut à un surcoût annuel de $300-800mds soit 1% à 3% du PIB américain – un véritable choc pour la croissance en l’absence de mesures de relance fiscale. Ce choc est doublé d’un choc inflationniste du fait des hausses de prix appliquées aux importations vers les Etats-Unis.
- Face à un tel risque de stagflation – croissance en berne et inflation élevée - il devient plus difficile pour la Fed de mettre en place une politique monétaire procyclique susceptible de contrer le choc de croissance à moins d’une crise de liquidité grippant les marchés financiers.
- A cet égard, il faudra être vigilant sur l’évolution du dollar même si sa baisse récente par rapport à l’Euro et au Yen s’explique davantage par des mouvements de réallocation d’actifs plutôt que par une réelle défiance à l’égard des actifs américains.
- Plusieurs éléments pourraient néanmoins venir éclairer ce tableau. Parmi eux, une volte-face de Trump sur ses annonces tarifaires sous pression des républicains ou bien un plan de relance budgétaire du congrès, même si cela nous semble peu probable à très court terme. En revanche, en Europe comme en Chine, une accélération des mesures de relance fiscale combinant des baisses d’impôts, des plans d’investissements et des plans de soutien aux secteurs directement impactés par les tarifs douaniers pourrait être envisagée. Cela aurait un effet direct très positif sur leur consommation domestique de façon à contrer la baisse induite par les tarifs douaniers sur les exportations. Rappelons que le coût des hausses tarifaires appliquées à la Chine et à l’Europe sont estimées à 1,5% et 0,5% de leur PIB respectif. Le danger le plus immédiat que pose l’application de tarifs douaniers records sur les importations américaines n’est en effet pas seulement le risque d’une perturbation des relations commerciales internationales, mais également celui d’une chute globale de la demande. La réponse la plus pertinente pour contrer le protectionnisme américain semble donc celle d’une relance de la croissance.